Le recrutement des instituteurs et des
professeurs de collège (CEG) après la seconde guerre mondiale, vit
des années troubles entre les lois, les directives, les circulaires,
les recommandations des différents ministres et la réalité du
terrain, les directeurs d'établissement s'adaptent aux
circonstances. Les années 1960 voient venir le baby boom et donc une
forte progression d'enfants inscrits dans les écoles avec
nouvellement l'école obligatoire jusqu'à 16 ans.
Si le cursus de l'instituteur-trice est
celui du bachelier (possibilité d'une bourse complète en cas
d'engagement décennal dans l'enseignement) suivi d'une, deux ou
trois années selon les variations ministérielles (dernière année
de formation dans un établissement) dans une école normale
départementale, la réalité est que quiconque veut être
instituteur-trice peut s'en prévaloir sans diplôme ou ne disposer
que d'un BEPC (Brevet
d'Études du Premier Cycle). Ces derniers ont un statut
de suppléant ou auxiliaire, puis remplaçant, c'est le cas des deux
tiers des effectifs enseignants dans les années 50-60. Ensuite
l'obtention du CAP (Certificat d'Aptitude Professionnelle) permet
d'envisager une titularisation.
Le cursus du professeur de collège est
celui du bachelier avec une formation en centre spécialisé. Là
encore, selon la faiblesse des effectifs les instituteurs normaliens
sont invités à embrasser le statut de professeur sans formation
particulière. L'expérience passée suffit. Chaque candidat garde
son statut d'instituteur malgré tout avant d'avoir eu une formation
de deux ans et à l'issu obtenu le CAPCEG (Certificat d'Aptitude
Professionnelle du Collège d'Enseignement Général). De nouveau, il
existe une dérogation notable : le titre de professeur est
accordé aux instituteurs ayant eu une inspection académique
favorable. Les inspecteurs octroient ce statut dans 95% des
recrutements de professeurs des collèges.
Il manque énormément de professeurs
dans les matières scientifiques que les anciens instituteurs
ignorent. Pour les professeurs de plein titre, le CAPES (Certificat
d'Aptitude Professionnelle d'Enseignement supérieur) fait son
apparition. L'élite du professorat privilégie les postes
universitaires.
Dans tous les cas, la difficulté de
recrutement est telle que l'administration de l'éducation nationale
récupère les candidats en échec. Les exclus des systèmes de
formation sont donc employés in extremis.
En ce qui concerne les écoles privées,
jusqu'en 1959, elles sont bien moins exigeantes dans les
recrutements. Les formations se font sur le tas après un entretien
d'embauche. La loi Debré de 1959 tente de réguler et d'imposer les
règles de sélection avec en contrepartie une prise en charge
financière des établissements sous contrat. Un contrôle
pédagogique, sanitaire et financier est prévu. Dans les faits, ces
contrôles seront sporadiques. Les écoles privées vivent en quasi
autarcie et les institutions laïques ne s'y impliquent pas. Les
frictions aux débouchés politiques ravageurs facilitent les
orientations spécifiques de l'enseignement catholique.
Dans le cas du Collège Saint Pierre du
Relecq-Kerhuon, la direction passe des annonces dans les journaux et
reçoit des candidatures spontanées par voie postale. Des
instituteurs-trices sans diplôme et des professeurs-res bacheliers
sont auditionnés dans le bureau du directeur. Les conditions de
travail sont expliquées et l'état d'esprit dédié à la fermeté
aussi. Il y a quelques cas de transfuges issus de l'école publique
adeptes de l'autorité scolaire. Côté laïc, le châtiment corporel
est de moins en moins appliqué bien qu'encore manifeste. Les coups
de règles résonnent toujours mais ne font plus recette. Si jamais
un enseignant ne se plaisait pas dans l'enseignement catholique, la
loi Debré permet une mutation dans l'école publique. C'est
d'ailleurs en partie l'intention du ministre que de puiser dans les
réserves privées des enseignants formés par l'expérience.
En conclusion le niveau des enseignants est qualifié de primaire (enseignement primaire) jusque la fin des années 1960. Dans les années 1970, le niveau des enseignants est qualifié de secondaire (enseignement secondaire). Dans le cas du collège Saint Pierre, bien des enseignants ont connu la période 1950, 1960 et ont fait leur carrière à leur poste de responsabilité... Avec une mentalité de ces années floues réglementairement, une absence de formation professionnelle encadrante, en confrontation ou en concurrence avec l'enseignement laïque et avec des moyens aléatoires selon les décisions politiques souvent anticléricales ou du moins suspicieuse. Un travail dans un univers clos imperméable aux évolutions sociétales, tout en se prévalant d'être les gardiens des valeurs traditionnelles. Le conservatisme enseignant immuable durant des décennies avec la certitude du devoir escompté accompli. Les résultats à 100% au BEPC, prouvait l'entièreté de la démarche éducative.

Le collège
Fondateur de l'école St Pierre • L'histoire du collège St Pierre • Le directeur • Sous-directeur • Le recrutement • Les professeurs • La mixité • Le silence des élèves • Le plaisir dans la violence • Le directeur des collèges • Responsabilités des parents • Témoignage • Victimes
Institution religieuse
Communiqué de presse • Dissimulations des autorités religieuses • Déclarations imprudentes • Les institutions savaient • Direction de l’Enseignement catholique • Autonomie de l'enseignement privé • L'Eglise pardonne
Le contexte
Mai 1968 • L'histoire du Relecq-Kerhuon • Le CES insatisfaisant • Palmes académiques • La presse muette • Avis maladroits
La législation
Déccret 1887 • Loi 1959 • Décret 2025 • Le parquet de Brest • Les suites judiciaires attendues • L'anonymat obligé • L'audition par la commission d'enquête • Les établissements coupables