A l'origine, les hameaux du Relecq et
de Kerhorre/Kerhuon sont sous la juridiction de la grande commune de
Guipavas dont le bourg est éloigné de 5 km environ. Au cours du 19ème
siècle, la population se déplace en sabots de bois quel que soit le
temps ; il y a bien quelques charrettes mais elles reviennent
aux fermiers aisés. Les deux hameaux sont sans chapelle, sans
cimetière et sans école. L'isolement est complet et l'entretien des
chemins, des commodités n'est pas assumé par la municipalité distante. Les habitants de chaque hameaux verraient bien une
autonomie administrative et donc la création de deux communes
distinctes de Guipavas. Les bourgeois Guipavasiens sont contre, perte
d'influence et de recettes fiscales.
Pour obtenir le statut de commune, il
faut prouver au préfet que la future entité est suffisamment dotée
par l'impôt pour subvenir aux besoins de la gestion de son fonctionnement : travaux, salaires.... Les
comptes sont vite faits. Les Relecquois sont paysans et pauvres mais
taxés sur leur foncier. Les Kerhorres sont pauvres, à peine taxés voire pas
du tout ; ils sont pêcheurs sans propriété terrienne. Même si le
regroupement s'impose pour tenter de convaincre, l'administration,
largement guidée par la bourgeoisie guipavasienne francophone, fait
barrage aux souhaits de la population bretonnante des hameaux.
L'Eglise s'en mêle sous l'influence de
l'abbé Jean-Marie Letty qui obtient un droit de paroisse par décret
signé de la main de Napoléon III, le 6 janvier 1869. Une paroisse
c'est bien, une commune ce serait mieux.
Le tout nouveau tracé de la nouvelle
ligne de chemin de fer construite suite à l'élévation d'un viaduc
(1861-1865) qui enjambe l'Anse de Kerhuon, la construction d'une gare
qui amène des bourgeois de Brest qui se font construire des villas
de villégiature en bord de mer côté Kerhuon, décalent le centre
d'activité de Guipavas plus au Nord et cette fois loin de tout. Le
Relecq (Nord de la ligne de chemin de fer) et Kerhuon (au Sud)
constate un essor démographique constant qui urbanise les terres et
génèrent des rentes fiscales nouvelles.
La population croît sans cesse et un
bureau d'état civil est ouvert en 1877 qui fait scission avec celui
de Guipavas.
Cette fois le niveau d'autonomie
financière est suffisant et l'abbé Letty ne manque pas de le faire
savoir en préfecture. Il se sait appuyé par la bourgeoisie
brestoise résidente et influente. Des commissions statuent enfin à
la condition que la commune de Guipavas soit dédommagée. Les
accords signés, la commune du Relecq-Kerhuon est entérinée le 30
mars 1896 par une loi de démembrement inscrite au journal officiel
dans les jours qui suivent.
La population est mi-satisfaite car les
Relecquois conservateurs, catholiques pratiquants issus de la terre
n'apprécient guère les Kerhorres progressistes radicaux plus ou
moins anticléricaux issus de la mer. Les mentalités sont rigides et
quand un Relecquois a des vues sur une Kerhorre ou inversement, les
mariages sont l'occasion d'une franche hostilité qui perdurera tout
au long de la vie du couple.
Cette fracture sociétale est animée à
l'échelon national... La séparation de l'église et de l'état (loi
du 9 décembre 1905) est une déflagration bien visible sur le
terrain, les gendarmes à cheval viennent expulser les ordres
religieux de leurs bâtis sous les huées des cathos et les rictus
des anti-cléricaux.
La poudrerie du Moulin-Blanc (1886) et
la pyrotechnie de Saint-Nicolas (1906) au service de la Marine de
Brest créent des milliers d'emplois et ajoute une population
nouvelle au Relecq-Kerhuon. Des ouvriers syndiqués de la
Confédération
générale du travail (CGT), renforcent le climat de défiance à
l'encontre de l'Eglise. L'Abbé Madec, fondateur du collège St Pierre organise un syndicat catholique dans ces usines pour
contrebalancer un socialisme agnostique en pleine croissance :
le Syndicat des « ouvrières du 2e dépôt »
en 1911, l'année de la fondation de l'école.
Entre les deux guerres mondiales, les
clivages persistent, les opinions religieuses se confrontent aux
opinions politiques et le socialisme et apparentés deviennent
majoritaires dans des municipalités de gauche reconduites.
L'Eglise se sent à l'étroit et
cherche des opportunités pour trouver un nouveau rayonnement. Le
point faible de la République obséquieuse est l'enseignement. Les
parents catholiques sont bienheureux d'avoir une école qui pratique
l'enseignement magistral sans contestation possible. Les résultats
sont bons. Les écoles laïques – les écoles du diable –
subissent les variations programmatiques des politiques parisiennes
de l'éducation nationale. Un climat d'instabilité plane. Tout au
contraire, la rectitude de l'école privée s'enracine. Cela se sait
et s'apprécie.
Les Relecquois sont acquis à ce
traditionalisme qui s'exacerbe avec le temps alors que du côté laïc,
les expérimentations diluent la qualité de l'enseignement. Les
Kerhorres et son milieu de plus en plus ouvrier et de moins en moins
pêcheur privilégie l'école de la république souveraine avec la
gratuité à la clé.
Cependant au fil des années et surtout
lors de la reconstruction du pays après la fin de la seconde guerre
mondiale, ceci à partir de 1950, date à laquelle un jeune aumônier
de l'armée est recruté en tant qu'enseignant, les considérations
strictement religieuses s'estompent. Les parents radicaux commencent
à inscrire leurs enfants à l'école privée. La tendance est
bretonne, l'école privée est plébiscitée partout dans la région
pour son savoir-faire et son autorité. De plus en plus de métiers
exigent un niveau scolaire décent.
L'Eglise a trouvé un point d'appui
qu'elle ne lâchera pas et qu'importe si la violence corporelle
illégale entache l'œuvre éducative dédiée aux élèves, il faut
rayonner davantage. Pour rayonner davantage, il faut frapper
davantage. L'enseignement est le seul sommet que conserve le diocèse,
tout le reste s'effrite, se volatilise, se relativise. Les croyances
déclinent... On se passe du bon dieu, pas de son école !

Le collège
Fondateur de l'école St Pierre • L'histoire du collège St Pierre • Le directeur • Sous-directeur • Le recrutement • Les professeurs • La mixité • Le silence des élèves • Le plaisir dans la violence • Le directeur des collèges • Responsabilités des parents • Témoignage • Victimes
Institution religieuse
Communiqué de presse • Dissimulations des autorités religieuses • Déclarations imprudentes • Les institutions savaient • Direction de l’Enseignement catholique • Autonomie de l'enseignement privé • L'Eglise pardonne
Le contexte
Mai 1968 • L'histoire du Relecq-Kerhuon • Le CES insatisfaisant • Palmes académiques • La presse muette • Avis maladroits
La législation
Déccret 1887 • Loi 1959 • Décret 2025 • Le parquet de Brest • Les suites judiciaires attendues • L'anonymat obligé • L'audition par la commission d'enquête • Les établissements coupables